C'est en traversant le hall d'entrée que la jeune femme m'interpelle.
– Monsieur Lefebvre bonjour, voulez-vous participer au jeu de l'assassin, vous avez jusqu'à ce soir minuit pour vous inscrire !
La jeune femme, 20, 22 ans insiste. En temps normal, je l'aurai envoyé balader, mais je ne l'ai jamais croisé dans le secteur, et en plus, elle est très jolie, ça lui donne quelques excuses.
– Bonjour Mademoiselle, comment connaissez-vous mon nom ?
La jeune femme ne me répond pas, mais insiste !
– Connaissez-vous le jeu de l'assassin Monsieur Lefebvre ? Et l'expression, « Faites vos jeux... les jeux sont faits... rien ne va plus, connaissez-vous ! »
– Le jeu de l'assassin je ne connais pas, mais l'expression, Faites vos jeux... les jeux sont faits... rien ne va plus, je connais ! Mais venez donc vous asseoir, je vous offre un verre, vous m'expliquerez tout ça, jolie demoiselle !
Très rapidement nous nous retrouvons attablés.
– Monsieur Lefebvre, savez-vous d'où nous vient cette expression prononcée en trois temps par le croupier à la roulette dans les casinos !
– Je crois que c'est un croupier Italien qui a prononcé ces mots, au XVIIe siècle, je pense !
– Cette expression que le croupier prononce en trois temps, nous arrive effectivement d'Italie. « Faites, vos jeux » dès que la bille est lancée, les joueurs posent alors leurs jetons ; puis dès que celle-ci aborde les chiffres en bleu, il prononce « les jeux sont faits » et il n'est alors plus permis de miser, ni même de bouger les jetons ; puis dès que la bille aborde la partie centrale, en jaune, rouge, et noir, il prononce « rien ne va plus ». Mais ce n'est pas ce Monsieur qui l'a inventée, cette expression nous arrive de la nuit des temps. Nous en avons retrouvé des traces, sur l'île de Rhode, dans les Cyclades, et ailleurs au temps de la Grèce Antique.
Cette expression en trois temps était prononcée à l'occasion des jeux de l'assassin très prisé à cette époque dans cette partie du monde, mais plus encore sur cette île de Rhode. L'intendant, chef du village prononçait alors « Faites vos jeux » et les joueurs assassins racontaient leur histoire ; puis lorsqu'il prononçait « les jeux sont faits » l'histoire était terminée, les joueurs assassins ne pouvaient plus rien en changer ; et dès qu'il ne prononçait « rien ne va plus », les détectives (mot issu du latin detergere) pouvait commencer leur enquête. Ce jeu commençait au 1er mai, pour s'achever à minuit à l'occasion du solstice d'été. Barberousse, le fameux pirate de la Méditerranée, était un inconditionnel du jeu de l'assassin, il y jouait avec ses prisonniers, et n'avait aucune pitié pour les perdants. Magnanime avec le ou les vainqueurs, qui étaient libérés et auxquels il faisait cadeau d'un coffre rempli de pièces d'or.